Gospel – Tome 1
Gospel
Bien que ma connaissance de l’histoire anglaise soit limitée et que le roi Henri VIII et moi n’ayons guère passé de temps ensemble, après une rapide recherche, il s’avère que c’est un roi plutôt célèbre pour ses actions, et pas forcément en bien. Cela fait de lui une source relativement riche en contes et légendes.
C’est en partie grâce à lui qu’aujourd’hui nous avons droit à Gospel. Ce comics se déroule dans la période troublée de la transformation de l’église. C’est dans ce contexte que Will Morris nous raconte, à travers deux lignes temporelles différentes, l’histoire de Mathilde, l’héroïne auto-proclamée de la paroisse de Rumpsted, et de Pitt, son scribe. Tous deux vont se retrouver face à des événements qui les placeront tour à tour dans des situations mêlant réalité, machination, supercherie, et surtout récits épiques. Ils devront démêler le vrai du faux et surtout sauver leur paroisse. Mais comme dans toute aventure, elle n’est épique que si tous les ingrédients sont présents pour en faire une légende; le talent de Pitt devra faire son œuvre.
En suivant les cinq chapitres de cette histoire auto-contenue, nous faisons un ping-pong entre la ligne temporelle de Mathilde et Pitt et une ligne temporelle plus contemporaine, où un homme mystérieux s’entretient avec une sorte d’assistante sociale qui vient juger son état de santé.
Malgré quelques libertés prises par les auteurs sur les personnages de la période médiévale, on se laisse facilement embarquer par la dynamique du duo. Mathilde et Pitt fonctionnent bien ensemble. Leur aventure est suffisamment bien écrite pour nous pousser à toujours tourner la page pour connaître le dénouement du mystère ou la suite de l’aventure. Lorsque Rumpsted est mis à feu par ce qu’on imagine être le diable, Mathilde part braver les dangers pour sauver tout le monde.
Côté scénario, c’est une aventure plutôt bien écrite, assez épique pour donner suffisamment de détails au lecteur pour qu’il ne lève pas le bout du nez. La force du titre réside, à mon sens, dans les allers-retours avec le présent, mettant le lecteur dans une sorte de doute permanent: est-ce vraiment une histoire réelle ? Est-ce que le narrateur est complètement fou ? On est vraiment dans un flou total, du moins jusqu’au chapitre 3 où j’ai commencé à comprendre comment l’auteur avait tourné son histoire. Malgré tout, lors de la conclusion et de la révélation finale, j’ai eu un léger doute. Cela, pour moi, ajoute un intérêt au titre: réussir à garder ce mystère tout au long de l’histoire est très fort.
Le rythme du scénario est parfaitement accompagné d’une mise en page dynamique et de couleurs douces. C’est plutôt organique, et les interactions entre personnages, actions, et décors fonctionnent parfaitement. J’aime particulièrement les effets de lumière et d’ombre proposés. Le fait que Will Morris soit seul sur ce titre joue certainement sur le fait qu’il ait pensé sa mise en page comme son scénario se présente dans son esprit; cela se voit et se sent.
Gospel est le récit d’une jeune femme cherchant gloire et reconnaissance dans un monde qui ne perçoit pas les choses de la même façon. Malgré les difficultés qu’elle va rencontrer, on se rend surtout compte que, peu importe l’aventure, le plus important est par qui elle est écrite et surtout comment elle est racontée. Ici, vous avez droit à un savant mélange de tout cela, maîtrisé du début à la fin pour une aventure auto-contenue en un tome, sur lequel j’ai pris beaucoup de plaisir.
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