Polar – Œil pour œil
J’ai lu le Tome un de Polar, « Venu du Froid » rapidement, dans un coin de FNAC [oui, j’en ai honte]. Malgré des qualités graphiques évidentes, bien qu’un peu trop Sin Cityesques à mon goût, c’est une histoire que j’avais déjà eu l’impression de lire, notamment dans Denver, du même éditeur. Glenat a eu la gentillesse de nous faire parvenir le Tome 2, « Œil pour œil« . Et là, j’ai pris le temps de m’accrocher aux pages…
Une femme, Christy, est secourue par un vieux solitaire bougon alors qu’elle semble presque morte, ballottée par des eaux glacées après avoir reçu une balle dans la tête. Comble du hasard, ce vieux s’avère être Black Kaiser, le héros du Tome un. Après une lente et douloureuse convalescence, Kaiser va apprendre à Christy tout ce qu’il sait pour qu’elle puisse exercer sa vengeance envers ceux qui l’ont laissée pour morte. Ponctuée de flash-backs démêlant l’histoire, Christy va avancer tel un rouleau compresseur jusqu’à obtenir réparation.
À noter également deux histoires courtes à la suite du récit principal, dont une mettant en scène Kaiser, de qualités inégales, mais permettant d’approfondir un peu plus les personnages.
Comme sur le Tome un, Victor Santos assure tous les postes, à savoir scénario, dessin et couleur. Et la couleur de ce volume, c’est le rouge. Rouge sang, évidemment! Car Christy n’a peur de rien et va jusqu’au bout de sa démarche, par tous les moyens nécessaires. Les dessins sont superbes, dans un noir et blanc rehaussé de touches (ou de litres) de couleur. Le contraste entre le noir, le blanc et le rouge saute au visage et déborde d’énergie. Chaque planche est une ouvre d’art en soi et bénéficie, en plus, d’un découpage tout simplement magnifique et inventif. C’est à une explosion de talent graphique que l’on assiste.
Le scénario, comme sur le Tome un serais-je tenté de dire, n’est pas d’une originalité folle. Il s’agit d’une histoire de vengeance assez basique et sans réelles implications cachées ou gros twist-de-la-mort-qui-tue. Mais il se laisse néanmoins lire sans temps mort, bénéficiant d’un rythme parfaitement calculé et adapté.
C’est au niveau de ses influences que Polar frappe très fort. Si le premier lorgnait, indubitablement, du côté de Sin City, bien que je sois persuadé que ce n’était pas la volonté de l’auteur, on retrouvait également un petit côté Red qui faisait passer la sauce. Œil pour œil va plus loin. Alors oui, noir et blanc plus touches de couleur, thématique de la vengeance, ça fait penser à Sin City. Mais uniquement parce qu’il est sorti avant. L’œuvre de Santos me semble plus complète, plus aboutie, que ce qu’a proposé Miller [aïe, non, pas la tête]. On y retrouve un peu de XIII, la séquence d’ouverture faisant immanquablement penser à celle de Le Jour du Soleil Noir. Mais ça ne s’arrête pas là. J’ai retrouvé du Will Eisner dans Polar dans le personnage de Christy, femme fatale que n’aurait pas renié le créateur du Spirit. Mais plus qu’à P’Gell, c’est surtotu à la mariée revancharde de Kill Bill qu’on peut comparer Christy. Et pour finir, on retrouve également une ambiance, un esthétisme que ne renierait pas Sebba sur Le Privé.
Tout ceci a permis de créer une œuvre nouvelle, habitée par une certaine grâce. Véritable bombe, Œil pour œil va immanquablement trôner dans les bibliothèques de tous les amateurs de polars [pas la série, le genre], mais également de pulps et d’histoires de femmes fortes. De plus, son format à l’Italienne attirera forcément le regard.
Si vous aimez tout ce que je vous ai cité ci-dessus, n’hésitez pas et foncez chez votre libraire!