TGS, Part 2, Paul Renaud
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TGS, Part 2, Paul Renaud

On continue avec une seconde interview, toujours organisée par Michel de Hype Media, et cette fois c’est le non moins célèbre Paul Renaud qui après quelques échanges sur le stand, nous a fait le plaisir de repondre à nos petites questions.

 

[ – INTERVIEW PAUL RENAUD– ]

 

Renaud

 Photo par katchoo

Chroniques Comics : Bonjour Paul, peux-tu nous présenter ton parcours rapidement?

Paul Renaud : J’ai commencé dans des fanzines, plus exactement un fanzine toulousain appelé « Black out », avec d’autres passionnés. J’y faisais des BD, des interviews, des articles, pleins de petites choses comme ça. Suite à ça et après un début un peu avorté sur la BD franco-belge, j’ai été contacté par Soleil, pour qui j’ai commencé à faire un projet qui ne s’est malheureusement pas terminé, comme souvent à l’époque. Heureusement, car ça m’a permis quand même de faire des pages, et de fil en aiguille, si je me souviens bien, des collectionneurs américains ont vu mon travail grâce à la connotation comics de mes dessins, et ça s’est retrouvé en ligne. Un dessinateur du nom de Frank Cho a vu ça, l’a montré à pas mal de monde sur son forum, notamment l’éditeur de Cavewoman qui m’a fait faire des comics. A la suite de cela j’ai rencontré Rick Remender qui m’a demandé de faire une petite histoire sur Fear Agent, qui a été repérée par Marvel qui m’a tout de suite proposé du travail, tout comme d’autres éditeurs du genre Dynamite, etc.

Chroniques Comics : Donc on peut dire que c’est monté crescendo assez rapidement?

Paul Renaud : Oui tout à fait, et c’était parfait parce qu’à cette époque-là c’était quand même assez rare de pouvoir travailler pour les États-Unis. Je pense que je suis un des premiers de ma génération à avoir pu bénéficier d’Internet pour être repéré. Encore une fois, je le redis, pour moi ça a été parfait dans le sens ou je ne pensais pas pouvoir faire des comics un jour. J’en ai toujours rêvé, parce que plus jeune, c’était ma lecture préférée.

Chroniques Comics : Donc à la base tu ne visais pas le monde du comics quand tu t’es lancé?

Paul Renaud : C’est ce que j’aimais, mais d’un point de vue pragmatique je pensais devenir dessinateur de B.D pour un éditeur français.

Chroniques Comics : Tu nous as parlé de la connotation comics assez forte de tes dessins, quels sont les artistes qui t’ont influencé ou inspiré?

Paul Renaud : J’ai grandi dans les années 80 donc, comme tous les gens de ma génération, on a eu la chance de grandir avec de grands artistes comme Frank Miller sur DareDevil, ou John Byrne et Chris Claremont sur les X-Men. C’était une époque où il y avait beaucoup de dessinateurs/scénaristes sur les plus grandes séries de Marvel, comme Thor de Walt Simonson, ou Allan Davis aussi qui lui est arrivé un peu plus tard. Mais clairement la grande série de l’époque c’était celle des X-Men qui dans Strange en France. Je n’ai découvert qu’un peu plus tard les séries plus indés, pas forcément underground, mais des séries comme Nexus qui était assez formidable et qui sort encore de temps en temps. Mais on peut dire que mes influences étaient essentiellement américaines.

Chroniques Comics : Le fait d’avoir mis les pieds aux États-Unis dans le monde du comics et de travailler avec de grands éditeurs t’a-t-il permis de rencontrer les idoles de ton enfance?

Paul Renaud : J’ai rencontré principalement des gens de ma génération, je ne peux pas dire que ça soit les références de mon enfance, mais en dessinateur j’ai eu la chance de devenir ami avec certains d’entre eux, ce qui, pour moi, est encore plus incroyable. Les artistes américains et anglo-saxons sont très accessibles, ce qui n’est pas nécessairement le cas en France. J’ai eu la chance de rencontrer Alan Davis avec qui je suis devenu ami, tout comme JG Jones, et Mark Schultz de Xénozoic Tales qui est une grosse référence pour moi. Carlos Pachecco aussi qui a dû annuler sa venue malheureusement, mais qui viendra la prochaine fois.

Chroniques Comics : D’accord. Passons maintenant au « vif » du sujet. En tant que dessinateur on imagine que ça demande une grande concentration, de ce fait as-tu de petits rituels avant de te mettre au travail? Comme une playlist préférée ou autre chose?

Paul Renaud : Oui, et de plus en plus maintenant. Je pense qu’on a vraiment besoin de s’oublier lorsqu’on dessine, sinon ça devient vite répétitif, du coup j’écoute toutes sortes de choses en passant par le podcast, qu’il soit sur les comics ou sur tout autre sujet, ou les musiques de film souvent très évocatrices, mais il faut surtout que j’évite les albums d’artistes que j’aime sinon j’ai tendance à plus écouter que travailler… Alors que les musiques de film c’est pile ce qu’il me faut.

Chroniques Comics : Je rebondis donc là-dessus, peux-tu te laisser influencer par certaines musiques en fonction des scènes que tu dessines?

Paul Renaud : Oui, mais influencé est un bien grand mot. Par exemple quand je dessine du Star Wars, mettre la musique des films ça aide à s’immerger. Ça aide beaucoup de mettre de la musique en fonction du thème, mais je fais attention à toujours calculer la musique en fonction de ce que je dessine et non pas l’inverse. En gros, je sais que je dois faire ça, donc je vais mettre tel type de musique.

Chroniques Comics : Penses-tu que, comme sur certains titres de chez Image, qui à la fin nous proposent une playlist à écouter, ce genre de pratique pourrait se généraliser dans les comics?

Paul Renaud : Oui ça pourrait, mais chez de grands éditeurs comme Marvel et DC il y a le contrôle éditorial, c’est-à-dire que c’est eux qui gèrent l’affichage des pubs, des pages, des articles, donc la décision leur revient. Mais c’est vrai que dès que je commencerai à faire des trucs perso, ce sont des idées qui viendront et qui pourquoi pas pourront avoir leur place.

Chroniques Comics : Ça tombe bien tiens, parlons un peu de tes projets perso. Est-ce que tu n’es pas intéressé pour produire une série pour laquelle tu dessinerais ce que tu écrirais?

Paul Renaud : Si, j’aimerais bien. J’avais commencé comme ça, à la base je dessinais toujours mes propres histoires, mais le marché américain lui est très segmenté, chaque personne a sa tâche, c’est plus facile d’avoir quelqu’un qui s’occupe du scénario et qui va pitcher, gérer les rapports avec les éditeurs, etc. Le dessinateur lui aura la lourde tâche de le dessiner. Il faut avouer que faire tout soi-même est assez compliqué, c’est pour ça qu’il vaut mieux s’orienter vers du Créateur Owned. Mes futurs projets le seront d’ailleurs, mais avec des amis scénaristes et dessinateurs avec qui j’ai déjà travaillé. On en parle de plus en plus, ça pourrait être ça pourrait arriver vite, tout le monde est prêt, ils n’attendent que moi. Mais c’est difficile parce que Marvel me propose toujours plus de projets difficiles à refuser, du coup mes projets perso passent au second plan. Ce n’est pas nécessairement un très bon calcul même financier alors qu’actuellement, ce serait une très bonne idée de créer, d’avoir les choses qui m’appartiennent. Je vais essayer de me convaincre et de me lancer, mais c’est quand même plus facile de céder à la tentation de gros éditeurs.

Chroniques Comics : En parlant de tentation ou de choix de création, comment choisis-tu ou es-tu choisi pour faire telle cover ou tel comics?

Paul Renaud : On a des relations assez étroites avec les éditeurs, on travaille fréquemment avec eux. Tellement qu’ils savent quasiment sans demander si je suis disponible ou pas. Il y a plusieurs éditeurs chez Marvel, certains vont me demander des couvertures, d’autres des intérieurs, il m’est déjà arrivé d’être sur une couverture et l’éditeur me dit « arrête tout mon patron te met sur autre chose! ». Du coup, tu arrêtes tout de suite, et ta nouvelle priorité est celle du patron, l’éditeur te proposera quelque chose d’autre plus tard, mais là c’est la priorité.

Chroniques Comics : Dans ce cas-là, tu ne peux pas refuser?

Paul Renaud : Par exemple Secret War, c’est quelque chose que je ne pouvais pas refuser, c’est une grosse faveur, c’est difficile de refuser un comics comme Secret Wars qui, a fortiori, est le Free Comics Book Day, tout le monde va le voir! On ne peut pas faire le difficile, l’éditeur aurait pu choisir n’importe qui et c’est un gros cadeau qu’il lui faisait, du coup on dit « oui oui, merci Monsieur ».

Chroniques Comics : Et en ayant ce genre de « faveurs », le fait de travailler principalement chez Marvel t’oblige-t-il à te plier à certaines contraintes, par exemple l’interdiction de bosser avec d’autres éditeurs?

Paul Renaud : Non j’ai pas de contraintes, cependant lorsque j’accepte un travail chez Marvel, le but c’est de finir, je ne vais pas accepter d’autres boulots qui vont me mettre en retard, ça, ce n’est pas possible. Je n’ai pas d’exclusivité, ce qui me permet de bosser ailleurs, mais il y a un accord tacite entre nous, ils m’ont demandé de les prévenir si je faisais quelque chose pour un autre éditeur au cas où ils souhaiteraient me proposer autre chose en contre-proposition.

Chroniques Comics : D’accord, nous arrivons au bout du temps qui nous est gentiment accordé donc je vais finir avec une dernière question. Quel est le comics que tu ne lâcherais jamais, même sur une île déserte, le comics qui te parlerait, sentimentalement, graphiquement et scénaristiquement?

Paul Renaud : Ce serait le comics de Frank Miller DareDevil, « Born Again ».

Chroniques Comics : Parfait, merci beaucoup pour ta sympathie et ce petit moment partagé avec Chroniques Comics. Bonne fin de TGS et à très bientôt.

Merci a Michel de Hype Media qui a pu gérer notre rencontre avec Paul Renaud.

 

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