Histoire de l’adaptation et Premiers Soucis – Partie 2
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Histoire de l’adaptation et Premiers Soucis – Partie 2

Bonjour et bienvenue à tous dans les Dossiers de GL ! Cette semaine, nous allons poursuivre la question sur l’adaptation et les premiers soucis que l’on peut y constater.

En plus de tous les univers cités dans la précédente partie, pas mal d’adaptations se sont vues avoir elles-mêmes des adaptations par la suite, comme le jeu vidéo tiré des comics DC : Injustice : les dieux sont parmi nous, qui a eu droit à un préquel en comics (Injustice Année Un à Cinq, et Injustice : Ground Zero), le jeu vidéo Batman Arkham Knight qui a également eu droit à un préquel homonyme en comics, le film Constantine – inspiré du comics Hellblazer – qui a obtenu une adaptation vidéoludique, ou encore les films Men in Black de Barry Sonnenfeld qui ont créé tout un univers d’adaptations vidéoludiques et animées.

Pourtant, l’idée même de l’adaptation ne tombe pas forcément sous le sens, et n’est pas appréciée de tous. Après tout, quel réel intérêt y a-t-il à recréer une histoire qui existe déjà dans un autre format (si ce n’est pour le gain d’argent, bien entendu) ? Et plusieurs artistes n’aiment pas l’idée de voir leur création être modifiée par d’autres. Comme le dit Pascal Lefèvre dans son article « Incompatible visual ontologies ? The problematic adaptation of drawn images » présent dans le livre Film and Comic Books. « Certains artistes sont même contre l’idée d’avoir une adaptation filmique. Par exemple, Art Spiegelman ne veut pas voir son Maus être adapté en film, parce qu’il considère le style métaphorique de son histoire essentielle et impossible à adapter en dehors du médium qu’est la bande dessinée », et dans le même genre, Frank Miller aimait trop son Sin City pour laisser son adaptation dans les seules mains de Robert Rodriguez. Malheureusement, même là, cela pose quelques problèmes : l’adaptation filmique est tellement proche de ce qu’il y peut y avoir dans le comic book que ça ne fonctionne pas forcément très bien ; pour la simple et bonne raison qu’il s’agit de deux médias différents et qu’ils n’ont pas les mêmes matériaux. Dans l’épisode de Bits sur le thème « adaptation et langages », déjà cité dans le Dossier « Civil War — Prélude à l’adaptation », Stéphane Moïssakis prend deux exemples qui ne fonctionnent pas dans Sin City. L’exemple de la violence, et l’exemple de Kevin. Tout d’abord, pour ce qui est de la violence, il cite la scène où Marv – le personnage principal du chapitre The Hard Goodbye, joué par Mickey Rourke dans l’adaptation – écrase le visage d’un malfrat contre le sol, tout en roulant avec sa voiture. La scène du comics est dure et très sombre, le lecteur ressent toute la violence de la scène et l’aspect horrible du geste de Marv. Tandis que dans l’adaptation filmique, la scène est assez lisse, limite trop propre. Elle passe sous les yeux du spectateur comme si de rien n’était, l’acte ne semble pas si grave. La violence de Marv est désensibilisée et le spectateur est « complètement déconnecté de ce qui est en train de se passer à l’écran », comme le dit Moïssakis.

À gauche, une image du roman graphique Sin City.
À droite, la même scène dans le film Sin City.

Stéphane Moïssakis cite également le personnage de Kevin — le tueur psychopathe, interprété par Elijah Wood dans le film. Le style particulier du roman graphique en noir et blanc donne des mises en scène très intéressantes, notamment sur le personnage de Kevin. Le tueur fou a de petites lunettes rondes sur le bout du nez qui, à la lueur de la nuit, forme deux cercles blancs sur son visage. Étant dans une bande dessinée, le style graphique ne choque pas, et rien ne paraît improbable. Mais une fois passé dans un film avec des acteurs, le rendu semble beaucoup plus réaliste, et ce genre d’effets, intéressant sous le format du dessin, devient bien plus dérangeant à regarder.

Kevin dans Sin City. À gauche, une case de la page 165
du premier comics ; à droite, une scène du film.

La lumière venant de derrière le personnage, ses yeux devraient être dans l’ombre (et donc, ses lunettes aussi) ; et inversement, la lumière qui illumine ses yeux au point de faire briller ses lunettes rondes devrait éclairer le reste de son visage, qui reste pourtant dans l’ombre. Dans le comics, la scène ne choque aucunement, mais dans le film, quelque chose dérange. L’image ne semble pas logique et peut créer un trouble chez le spectateur.

Voilà, c’est tout pour aujourd’hui ! On se retrouve dans deux semaines pour la suite de ce sujet !

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