Fondu au noir
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Fondu au noir

C’est une sale histoire, ce qui est arrivé à cette poulette. La môme avait tout pour réussir : belle, blonde et pas farouche, c’était l’archétype de la starlette. À grand coup de rouge à lèvres carmin et de mascara, elle avait réussi à faire fondre le cœur du magnat du studio Victory Street. Il ne s’en est pas remis, le pépère!

Valéria.

Valéria Sommers.

Un nom qui claque bien en haut d’une affiche. Noir et blanc ou technicolor, la pépée était promise à un grand avenir. Était? Eh bien, oui. Faut dire qu’elle ne s’est pas réveillée de sa dernière nuit de débauche. Contrairement à Charlie, un petit scénariste has been d’Hollywood qui en pinçait pour elle. C’est lui qui l’a découverte au petit matin et, de toute évidence, quelqu’un avait décidé de serrer le kiki à la môme jusqu’à ce qu’elle trépasse. Englué dans sa soulographie chronique, le petit gars ne se souvenait de rien. Au lieu de faire appel à un professionnel, il décide de découvrir la vérité et de la faire éclater au grand jour. Mais c’est pas un privé, le Charlie. Il a plus de chance de se faire éclater le pif que de réussir en jouant au détective.

Faut dire que c’est pas la joie à Hollywood Land en ce moment. En pleine chasse aux sorcières, les fédéraux sont bien déterminés à débusquer du rouge dans tous les recoins glauques de l’industrie du cinéma. Pas de pitié, pour personne! C’est le crédo des fédéraux et s’ils ont décidé que vous faisiez partie des cocos, ça sent le roussi pour vous!

Fondu au noir.

C’est comme ça qu’on nomme la transition entre deux scènes de cinéma séparées par un court instant d’image noire apparaissant progressivement. Et du noir, il y en a beaucoup dans ce volume reprenant l’intégrale de la maxi-série The Fade Out.

Noir est le scénario d’Ed Brubaker, qui ne laisse aucune place à l’improvisation et aux “trous scénaristiques”. D’un autre côté, c’est ce qu’il faut pour raconter un polar mettant en scène un scénariste Hollywoodien.

Noir encore, le dessin de Sean Phillips. Soyons honnête, certaines cases sont foirées, les proportions pas toujours gardées et les visages pas toujours ressemblant le long du volume. Mais vous savez quoi? On s’en fout! Et on s’en fout parce que le bonhomme sait installer une ambiance, a un sens du storytelling à toute épreuve et réussit à vous embarquer dans cette enquête en compagnie de son compère scénariste sans qu’on ne s’en rende compte.

Noir toujours pour la colorisation d’Élisabeth Breitweiser qui sublime les scènes de nuit, de débauche et apporte un éclairage tombant à point nommé sur les moments les plus crus.

Avec Fondu au Noir, on dépasse de très, très loin le médium “comics” pour entrer dans les hautes sphères du polar. Brubaker nous livre une histoire digne de Raymond Chandler tout en reposant sur un pan de l’histoire des États-Unis à la fois glamour et effrayant. Une réussite!

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